Du 29/04 au 09/05
Les difficultés
s'effacent vite surtout sous ses latitudes !
Trop de bateaux
sont arrivés à notre goût, aussi nous filons à Taravaï dès que
l'occasion se présente.
C'est l'île qui a
touché notre cœur, non seulement par la beauté du site, mais aussi
par les occupants.
Il n'y a que trois
familles vivant à l'année, mais ces personnages sont uniques et
extraordinaires.
Leur porte s'ouvre
avec gentillesse, simplicité et humour.
Ici on a le temps
de parler, boire un thé à toutes heures, manger ensemble, on a le
temps de pêcher, de jouer aux raquettes, freesby.. On est toujours
les bienvenus et la sincérité se lit sur les visages.
La générosité
est naturelle, tout autant que leur façon de vivre
Une leçon
d'accueil qui fait du bien à nous Européens. Nous sommes invités à
manger, à chasser, pêcher, discuter, jouer, rire d'un rien...
Aussi les journées
glissent agréablement.
Il va falloir
penser à partir bientôt vers les Tuamotus. Mais c'est dure de
quitter un tel lieu !
Une navigation de
400 milles nous attend et cette fois l'envie de naviguer est
présente...
Nous partons
demain finalement car la météo semble bonne. Derniers préparatifs
avant départ...
Retour à Rikitéa au village car la
météo n'est pas top.
Il fait nuit nous sommes prêts à
aller nous coucher quand le vent monte soudainement en changeant
complètement de secteur, il passe au Sud..
Depuis deux jours un léger vent de
nord souffle inhabituellement et aujourd'hui l'air est lourd pesant.
Les rafales nous alertent et Marco
sort faire une inspection nocturne. Il reste un bon moment ainsi dans
le cockpit un œil sur l'anémomètre qui commence à s'affoler. Il
voit le catamaran amarré à côté de nous avancer, étrange....
Peut être soulage t-il son ancre
avec un appuis moteur ?
Mais lorsque Marco regarde derrière ,
tous les bateaux amarrés se rapprochent de nous à vive allure.
« On dérape » !!!
hurle t-il.
Nous sommes pris dans une rafale, nous
dépallons à grande vitesse sur les bateaux et sur les reefs.
J'allume le moteur et mets plein gaz
pour redresser au plus vite la situation. Marco se précipite à
l'avant pour relever l'ancre. Nous avons un problème avec le
connecteur du guindeau et pour remonter la chaîne il faut mettre en
contact manuellement 2 fils qui se trouvent dans la baille à
mouillage. Evidemment dans la panique on ne trouve plus la
frontale... Marco court dans tout les sens ! J'essaye de
stabiliser le bateau.
A présent les rafales s'intensifient
avec des claques de près de 40 nœuds, un rideau de pluie s'abat sur
nous. Je n' y voit plus rien et j'ai du mal à garder le bateau face
au vent. Le nez se fait parfois prendre et nous nous retrouvons en
travers, le bateau incontrôlable ! Nous sommes entourés de
bateaux dont certains sont sans lumière de mouillage. C'est
l’enfer !
Une partie de bataille navale commence
où les règles sont celles de ne pas couler les navires.
Pour nous parler, il nous faut hurler
pour couvrir le bruit du vent, de la pluie et du moteur prêt à
exploser ! De toute façon on est tellement sous tension
qu'hurler n'est pas un problème !
Aveuglé par la pluie, nous jetons
l'ancre sitôt un peu dégagé. Mais nous allons droit sur un petit
bateau sans lumière qui apparaît au dernier moment. Re marche
avant, on remonte l'ancre à nouveau ! Nous devons recommencer
la manœuvre.
Marco se prend de grosses décharges
électriques avec les fils du guindeau durant toute l'opération.
Pluie, rafales et trouille ne se calment pas le moins du monde et je
commence à être prise de frissons, tout mon corps se met à
trembler, mes dents à jouer des castagnettes.
On mouille à nouveau, mais l'ancre
dérape !
« Putain , mais c'est pas
possible ! »
Et pour couronner le tout en remontant
la chaîne , le fil de connexion de la montée du guindeau vient de
se sectionner !
« C'est notre dernière
tentative et dernière chance, on a pas intérêt à se foirer cette
fois, on peut prier !! » me dit Marco complètement
électrisé. Heureusement le peu cheveux lui empêchent de les avoir
dresser sur la tête !
On tente de se décaler un peu et
d'aller mouiller plus haut cette fois. Mais les chiffres du sondeur
baissent d'un coup et nous en dissuade ! Il y a des reefs tout
autour... Je pars donc dans l'autre sens à l'aveuglette et à fond.
Un catamaran a l'heureuse idée de
nous éclairer avec une lampe poche ce qui nous permet de se situer
et de se rabattre dans sa direction.
Les secondes après avoir jeté
l'ancre sont intenses. L'ancre va-t-elle tenir et ne serons nous pas
trop proche d'un autre voilier ?
Il semble que cela soit ok.
Dégoulinant, frissonnant et à moitié choqué, nous rentrons nous
remettre de nos émotions. On s'en est bien sortit ; nous avons
évité le pire plusieurs fois de suite.
C'est la première fois que nous
dérapons ainsi ! On réalise qu'il suffit de quelques secondes
pour que tout bascule !
Et là il s'en est fallu de peu pour
que le voyage s'arrête!
Là encore nous nous réjouissons
d'être deux à bord... et pensons aux solitaires qui doivent vivre
bien des galères, lorsque les choses se compliquent !!!
Malgré l'alarme de mouillage branchée
nous ne fermons guère l'oeil de la nuit !
Cette configuration météo s'était
déjà présentée à nous à Pitcairn. ( Nous avions dû fuir le
mouillage précipitamment)
Il s'agit d' une dépression coincée
entre deux anticyclones générant des vents tournants et violents.
Le 30/04
Cette dépression ne semble pas
pressée de s'en aller. Le vent tourne sans cesse et nous refait le
même coup. Il s'oriente Sud et rugit à nouveau avec des élans de
fureurs.
Les fils ont été bidouillés, on
peut à nouveau se servir du guindeau pour lever l'ancre au prix de
quelques décharges électriques bien assaisonnées.
Encore une fois l'ancre dérape et le
bateau part sur le reef. Par chance il fait jour.
Ce qui ne nous empêche pas de
replonger dans une bonne galère.
Dès que nous jetons l'ancre, les
rafales ne laissent aucune chance à l'ancre de se poser au fond ( 18
mètres de profondeur) et on ripe.
Par trois reprises nous mouillons, à
la dernière nous arrachons l'avant du guindeau . La chaîne ne peut
plus être remontée car elle se bloque. Marco finit par remonter
l'ancre à la main, avant que nous venions embrasser un catamaran.
Moi je stabilise au mieux Tidoudou face au vent dans des rafales à
35 nœuds, sous une pluie battante.
La majorité des bateaux ont regagné
le village, aussi il n'y a plus beaucoup de place, ce qui nous
complique encore l'histoire. Nous ne sommes pas les seuls à déraper,
c'est rassurant !!
L'ancre est jetée et Marco ne semble
pas prêt de la relever encore une fois à la main !
Heureusement le vent se calme un peu.
Cela nous laisse le temps de bricoler ce foutu guindeau.
Durant des heures ça perce, ça
meule, ça usine... Un bricolage de fortune qui nous sauve la mise.